Ceux qui me suivent attentivement ont dû le remarquer : mon roman La nuit des sorcières a changé de titre en cours de route ; au départ, il s’intitulait La nuit de Yule. Cette modification m’a été demandée par les Editions Nestiveqnen qui estimaient que La nuit des sorcières constituait un titre plus lisible et parlant pour des lecteurs lambda, un avis auquel je me suis rangée bien volontiers. En effet, peu de gens connaissent Yule et son éventuel lien avec les sorcières. Ce moment du calendrier païen tient pourtant une place importante dans le livre et j’ai donc décidé de vous en parler. Et quelle meilleure date pour le faire que, précisément, le jour du solstice d’hiver ? Vous allez très vite comprendre ce que je veux dire. 🙂
Tout d’abord, quelques mots sur la Wicca, un mouvement religieux païen fondé dans les années 40 et qui synthétise pas mal de croyances anciennes comme le druidisme, les mythologies nordiques et celtiques ou encore le chamanisme. La Wicca est considérée comme une forme de sorcellerie moderne, notamment dans son rapport à la Nature et au vivant, et m’a servi en partie à créer les rituels des sorcières du Peuple Invisible. Une année religieuse wicca est rythmée par huit sabbats qui renvoient aux temps forts des différentes saisons (vous avez peut-être déjà entendu parler de Samhain qui a glissé vers Halloween…), notamment les solstices et les équinoxes. Dans la Wicca, Yule correspond au solstice d’hiver qui, en 2021, tombe aujourd’hui, le 21 décembre.
Le mot Yule en lui-même provient du vieux norrois Jól, dont sont issus Jól en islandais, Jul en danois, norvégien et suédois et qui signifient tous solstice. On retrouve la même racine dans certaines langues germaniques et notamment le vieil anglais ġeol qui désigne lui aussi le jour du solstice. Bref, vous l’aurez compris, Yule est le terme employé pour désigner le jour du solstice d’hiver ou la période entourant ce moment bien précis. A noter : chez les Scandinaves, le dieu attaché à Jol était Jólner, un des nombreux noms d’Odin. Et je ne mentionne pas ce détail parce qu’Odin est un de mes dieux favoris toutes mythologies confondues. ^^
Maintenant que nous avons éclairci l’origine de son nom étrange, que symbolise Yule ? La particularité du solstice d’hiver est qu’il correspond au jour le plus court et à la nuit la plus longue de l’année. Si, depuis le solstice d’été, les journées n’ont fait que raccourcir, désormais elles vont à nouveau s’allonger. Et même si Yule marque le début de l’hiver, il correspond donc aussi au retour progressif de la lumière. Ainsi, les rituels de Yule ont pour objectif de célébrer le renouveau et la victoire de la lumière sur l’obscurité. C’est précisément cette symbolique que j’ai utilisé dans mon livre et les évènements de la nuit de Yule dans le roman marquent à la fois l’ultime soubresaut des forces du mal et la victoire inéluctable de la lumière, suivie d’un véritable changement. Tout ça à l’échelle de mes personnages, bien sûr. 😉
Le solstice d’hiver a été célébré de mille manières à travers le monde et l’Histoire et je vous invite à cliquer sur les liens au bas de l’article si vous voulez en savoir plus. Je me contenterai de souligner que Noël est un exemple typique de la manière dont la religion chrétienne a absorbé les croyances païennes pour mieux les remplacer par les siennes : nombre des traditions de Noël (les cadeaux, les bougies de l’Avent, la bûche…) dérivent des pratiques païennes liées à Yule et au solstice d’hiver. Les premiers chrétiens ont placé la naissance de Jésus Christ à ce moment précis (alors que les historiens estiment apparemment qu’il serait plutôt né au printemps) afin de faciliter les conversions en maintenant un des temps forts de l’année païenne et en l’adaptant à leur sauce. Je précise que ce n’est pas un jugement, mais simplement un fait historique. En tant qu’athée, j’adore Noël et je trouve la période d’autant plus magique en sachant qu’elle a été célébrée de tout temps et de plein de façons différentes.
Pour en revenir à Yule, chez les Wiccans, la célébration se fait par un rituel, souvent centré sur la purification de la maison, des bougies symboliques, des méditations et surtout par le fait de brûler une bûche durant toute la nuit. Ces rituels peuvent s’étendre sur douze nuits, jusqu’au 6 janvier, période durant laquelle on pratique une activité mystique par soir, ces douze nuits représentant les mois de la nouvelle année à venir.
On retrouve d’autres pratiques autour du solstice d’hiver et de la fin de l’année partout à travers le monde. Les nazis, qui souhaitaient éradiquer le christianisme et en revenir à une sorte d’Allemagne païenne mythique, avaient même fait du solstice la grande fête de la SS, célébrée à l’instigation d’Himmler. Fort heureusement, ces dérives délirantes n’auront pas suffi à entacher une des périodes les plus fascinantes de l’année, ni à lui faire perdre de sa magie. Que l’on soit wiccan, chrétien ou athée, la nuit de Yule garde sa singularité et nous offre une belle occasion de nous interroger sur notre rapport à la lumière, à la Nature et aux autres. En attendant que le soleil se lève à nouveau… 🙂
Sources principales de cet article :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Yule
https://cainfuse.com/yule/
En tout cas, en Alsace, c’est une fête bien ancrée qui ne s’est pas perdue. Les festivités de l’avant Noël sont plus marquées que dans les autres régions françaises.
Ah l’Alsace et Noël… Une grande histoire d’amour, c’est sûr. ^^