Histoire de changer un peu de la SF, je vais vous parler aujourd’hui d’un roman de fantasy paru en avril de cette année : Derniers jours d’un monde oublié de Chris Vuklisevic. Il s’agit d’un premier roman et rien que pour ça, l’autrice mérite déjà que je lui tire mon chapeau ! Pour vous donner une idée, il a remporté le concours organisé pour les vingt ans de la collection Folio SF et a donc été publié directement en poche (ce qui est très rare, les poches étant généralement des reprises). Et comme vous savez que j’aime bien partir à la rencontre des auteurs et autrices dont je vous présente les livres, la semaine prochaine j’aurai le plaisir de partager avec vous une interview de cette nouvelle voix de l’imaginaire français ! En attendant, venez découvrir Sheltel, l’île du centre du monde…
Derniers jours d’un monde oublié
Le résumé :
Plus de trois siècles après la Grande Nuit, Sheltel, l’île du centre du monde, se croit seule rescapée de la catastrophe. Mais un jour, la Main, sorcière chargée de donner la vie et de la reprendre, aperçoit un navire à l’horizon. Il est commandé par une pirate impitoyable, bien surprise de trouver une île au milieu du Désert Mouillé.
Si la Main voit en ces étrangers une menace pour ses secrets, Arthur Pozar, commerçant sans scrupules, considère les intrus comme des clients potentiels, susceptibles d’augmenter encore, si possible, son immense fortune. C’est une nouvelle ère qui s’ouvre. Qu’elle les mène à la gloire ou à la ruine, la sorcière, la pirate et le vieux marchand en seront les instigateurs, bien malgré eux.
L’extrait :
Le matin où les étrangers arrivèrent sur l’île, la Main de Sheltel fut la première à les voir.
Elle allait revêtir son masque quand, par la fenêtre, elle aperçut un point sombre à l’horizon. Un mirage, crut-elle ; un tremblement de la chaleur sur l’eau. La mer était vide, bien sûr. Rien ne venait jamais de l’océan.
Elle ne lança pas l’alerte.
Mon avis :
Une fois n’est pas coutume, c’est une interview qui m’a donné envie de lire ce livre, celle que l’autrice a donné au site Justaword. J’ai trouvé ses propos intelligents et nuancés, ce qui est plutôt rare de nos jours, et ça m’a motivée à découvrir son premier roman. Un choix que je ne regrette pas alors que je ne suis pourtant pas une grande amatrice de fantasy !
Derniers jours d’un monde oublié nous emmène dans un univers original, assez éloigné des clichés habituels de la fantasy. Comme quoi, on peut inventer un monde sans que n’y figurent ni elfe ni dragon ! J’ai apprécié cette approche différente et le monde construit par Chris Vuklisevic est assez riche pour stimuler l’imagination et donner envie d’en savoir plus. Et pour ne rien gâcher, on y trouve même des pirates !
Le récit adopte tour à tour le point de vue de trois personnages. C’est une manière de procéder que j’aime beaucoup, parce qu’elle permet d’apporter des éclairages variés à une même histoire et en l’occurrence, cela fonctionne bien et donne un vrai plus au roman. Les chapitres sont également entrecoupés d’extraits de documents « officiels » qui donnent un aperçu un peu différent du monde de Sheltel et qui sont souvent empreints d’une pointe d’humour appréciable.
La mise en place de l’univers n’est pas pesante et s’intègre parfaitement à l’action. Pas d’interminables paragraphes pour expliquer qui est roi ou reine et pourquoi, les informations sont distillées au fur et à mesure et on s’immerge rapidement. Le rythme est prenant et l’action avance assez rapidement.
Si je devais faire un reproche au livre, ce serait un certain manque de profondeur, notamment au niveau des personnages. Je l’avoue, j’aime les univers très fouillés, mais plus encore les personnages que l’on apprend à connaître intimement. Ceux de Chris Vuklisevic ont un gros potentiel (aucun n’est manichéen, tous ont des noirceurs, des complexités), mais pour moi, le livre n’en tire pas assez parti et reste en surface. D’un côté, c’est ce qui permet d’éviter que le roman ne soit trop long (à vrai dire, il est même plutôt court pour un roman de fantasy), mais d’un autre côté, il me semble qu’on y perd. Certains éléments auraient mérité d’être davantage développés, ce qui aurait permis au livre d’atteindre encore le cran supérieur.
Mais je ne veux pas donner l’impression que mon avis est négatif. Au contraire, Derniers jours d’un monde oublié est un bon livre, très agréable à lire, original, et qui laisse espérer le meilleur pour les prochains romans de sa jeune autrice. En tout cas, c’est avec plaisir que je me pencherai sur ses prochaines publications ! Et je vous invite d’ores et déjà à passer un bon moment avec ce roman. 🙂