Parmi les livres qui m’ont beaucoup marquée figure le cycle de La Tour Sombre de Stephen King. J’ai déjà cité cet auteur à plusieurs reprises, il fait partie de ceux que j’admire beaucoup et dont j’adore l’univers. Et pourtant je n’apprécie pas vraiment le genre horreur (ni en livres, ni en films), je ne fais pas partie des gens qui aiment se faire peur. ^^ Mais Stephen King représente bien plus que ça pour moi et c’est quelque chose qu’on ressent particulièrement dans La Tour Sombre.
Pour ceux qui ne connaissent pas du tout, je vous propose le résumé que l’on trouve sur Wikipédia et qui constitue une assez bonne introduction au cycle :
Roland est le dernier pistolero encore vivant de la contrée de Gilead, aujourd’hui disparue. Son monde, semblable à la Terre par certaines similarités culturelles ou certains vestiges technologiques, est proche du Far West américain du XIXe siècle, mais la magie y est également présente. D’abord à la poursuite d’un mystérieux homme en noir, Roland va par la suite partir en quête de la Tour sombre, un endroit fabuleux censé être le pivot de tous les mondes possibles. Trouver cette Tour dans le but de guérir son monde à l’agonie va tourner à l’obsession pour le pistolero, qui va également devoir trouver des compagnons de route pour l’épauler durant ce long périple à travers différents mondes.
Ce n’est qu’un bref résumé, bien sûr, bien loin de rendre compte de la richesse de ces huit romans dont on retrouve des traces dans toute l’œuvre de Stephen King et dans lesquels il pousse la mise en abîme jusqu’à décrire la rencontre entre les personnages et leur auteur, à savoir lui-même. Outre le style génial de King, capable de poser une ambiance en quelques lignes, on y retrouve des personnages extraordinaires, complexes, profonds, attachants, très marquants. C’est une quête qui vous embarque complètement, haletante, sans cesse surprenante, sombre et lumineuse, magnifiquement épique.
Je ne vais pas trop m’étendre sur Stephen King, même si c’est un auteur essentiel pour moi. Je ne vais relever qu’une chose : le fait que la plupart des adaptations de ses livres sont un désastre (c’est notamment le cas pour La Tour Sombre ; le film est un pur gâchis…). C’est pour moi le signe que son œuvre est profondément littéraire, impossible à traduire dans un autre média, en particulier le cinéma qui se contente de reprendre l’histoire sans arriver à saisir l’essentiel : l’esprit des mots. Stephen King, ce ne sont pas juste des histoires un peu folles ou très gore, c’est avant tout un style unique qui constitue le véritable intérêt de son œuvre. Cette manière de pointer les détails essentiels, de brosser une scène ou un caractère en quelques traits, d’appuyer là où ça fait mal, de mettre la société américaine face à ses contradictions… Mais revenons-en à La Tour Sombre.
La principale caractéristique de ce cycle est pour moi la richesse imaginative que King y exprime. Il y a de tout dans ces romans : du western, de la fantasy, de l’horreur, de la SF, du mystique, de la philosophie, de l’initiatique… Il a mêlé tout ce dont il avait envie d’une manière décomplexée et jubilatoire. Et le résultat est tout simplement génial. Pour quelqu’un comme moi qui aime mélanger les genres et sortir des cases, La Tour Sombre est un véritable bonheur et, incontestablement, un modèle à suivre.
King ne semble pas s’être posé la moindre limite dans ce cycle, il s’est complètement lâché et c’est vraiment jouissif pour une raison très simple : c’est extrêmement bien fait. Malgré toutes les ambiances différentes que l’on traverse dans le livre, malgré les inventions les plus dingues, on n’a jamais l’impression de se faire balader, l’ensemble reste cohérent, crédible à sa manière et captivant. Ce ne sont pas seulement les personnages qui permettent de maintenir cette cohérence, mais aussi une certaine rigueur dans la construction, une ambiance générale subtile et, bien sûr, le style de l’auteur.
De la même manière qu’American Gods, La Tour Sombre montre pour moi à quel point on peut être ambitieux dans les littératures de l’imaginaire. Le monde qu’a construit Stephen King est merveilleusement riche et complexe, complètement déjanté, mais c’est aussi notre monde ; il fait écho, il nous renvoie à nous-mêmes, à nos innombrables facettes, à notre humanité. Comme souvent, si Stephen King nous emmène aussi loin, c’est pour mieux nous renvoyer à quelque chose d’intime et de personnel. Et c’est pour ça que ça marche.
Si A la recherche du temps perdu constitue pour moi l’idéal littéraire inaccessible, La Tour Sombre a quelque chose de bien plus proche qui fait que j’ai pour ce cycle encore plus d’affection que d’admiration. La Tour Sombre, c’est ce que j’aimerais pouvoir écrire si un jour j’arrive à puiser aussi profondément en moi ; c’est une ambition très lointaine, mais pas tout à fait hors de portée. Et surtout, ce sont des livres à découvrir absolument ! 😉